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29/12/2007

Jacques Sapir protectionniste.

Interview de Jacques Sapir par Pascale Fourier sur le protectionnisme

Pascale Fourier : Finalement, dans votre livre, La fin de l'euro-libéralisme publié au Seuil, vous remettez en cause le libre échange... en quoi ?

Jacques Sapir: Je crois que derrière le libre-échange, il y a deux débats, extrêmement importants. Il y a un premier débat général qui consiste à dire que fondamentalement l'abandon de tout obstacle à la circulation des biens et des capitaux engendre toujours et partout des situations qui sont favorables au plus grand nombre. Ce qui est faux. Les économistes le savent : ce n'est juste que dans conditions extraordinairement restrictives qui ne s'appliquent pas au monde réel. Nous savons que d'un point de vue général l'idée qui consiste à dire le libre échange est toujours et partout la meilleure des solutions n'est pas validée par nos connaissances en économie.
Après, il y a un deuxième débat, que je dirais plus contextualisé, qui consiste à se poser la question suivante : " Concernant deux ou un certain groupe de pays dont les caractéristiques économiques sont tout à fait semblables, qui ont des législations sociales et écologiques semblables, est-ce qu'il ne faut pas désarmer les protections tarifaires ? Est-ce que dans ce cas l'élargissement de la taille du marché n'est pas souhaitable ? ". C'est quelque chose qui se discute au cas par cas, il n'y a pas de lois générales. Quelquefois, c'est vrai, il vaut mieux effectivement procéder à un désarmement douanier tarifaire, mais il y a des cas où, malheureusement, ça ne s'applique pas.

Pascale Fourier : Dans votre livre, vous insistez sur le fait que le libre-échange empêche tout choix national notamment dans la protection sociale...

Jacques Sapir: Il y a une dimension politique qui n'est jamais avancée dans le libre échange et qui me semble pourtant tout à fait essentielle. Quand vous êtes en situation de libre échange, cela veut dire concrètement que les consommateurs comparent sur la base du rapport coût/qualité. Or dans la formation des coûts, nous savons très bien qu'il y a les niveaux de salaires, les niveaux de protection sociale - car la protection sociale coûte quelque chose - et les réglementations écologiques, qui elles aussi ajoutent quelque chose au coût. Le problème qui se pose est le suivant : admettons deux pays qui ont des niveaux de productivité et d'efficacité économiques à peu près similaires; dans un pays, on décide d'appliquer des normes écologiques relativement strictes et des normes sociales avantageuses, et pas dans l'autre pays. Et ces deux pays sont unis par un traité de libre-échange. Que se passe-t-il ? Les produits qui viennent du pays qui s'est imposé des contraintes sociales et écologiques plus importantes vont perdre leur compétitivité par rapport à l'autre pays. Et si les consommateurs obéissent à la logique coût/qualité - ce qui est tout à fait normal, et en tant que consommateur je réagirais aussi de cette manière-là -, alors les consommateurs vont en quelques sorte dénoncer la décision politique qui aura été prise, parce qu'en choisissant massivement d'acheter les produits venant du pays qui n'a pas adopté ces réglementations, ils rendent ces réglementations intenables dans le pays qui les a adoptées, soit sous la forme de faillites d'entreprises, soit sous la forme de délocalisations. Vous savez, les faillites sont une forme de délocalisation, de la même manière que les délocalisations sont une forme de faillite, car les deux se complètent en fait. Ce qui veut donc dire que dans un système de libre échange généralisé, c'est toujours le moins disant-moins coûtant qui l'emporte. Et là, on a un vrai problème. Et on le voit aujourd'hui, il y a une pression à la baisse à la protection sociale et à la protection écologique. Un exemple très simple: on a fait passer en Europe le protocole de Kyoto, ce qui a été difficile. Avec sa ratification par la Russie, ce protocole devient réellement applicable au niveau mondial. Mais nous savons qu'un certain nombre de grands pays, en particuliers les Etats-Unis, ne l'appliquent pas. Et d'ores et déjà, il y a des industriels français, allemands, belges qui viennent voir leurs gouvernements et qui demandent des exemptions aux contraintes du protocole. Pour des raisons très simples : il y a des industries, comme la chimie, la métallurgie en particulier, où le protocole de Kyoto est susceptible d'ajouter 10 à 15 % au coût de production, à technique comparable. Ça crée des problèmes très réels de compétitivité. Alors que fait-on ? On laisse la situation de libre-échange et on va défaire d'une main ce qu'on a fait d'une autre ? Et surtout on va la défaire d'un point de vue technique alors qu'il y a eu une ratification politique du protocole de Kyoto ?! Ou on se dit : chaque société, chaque espace politique national a le droit de faire ses choix - on peut les considérer comme bons ou mauvais, mais c'est une autre question, et tout le monde a le droit de se tromper. En tout état de cause, ce qu'on ne peut pas accepter, c'est que les choix d'autrui viennent s'imposer à vous ! Et c'est bien le problème de fond posé par le libre-échange : c'est que poussé jusqu'à un certain point, le libre-échange enlève toute autonomie au choix politique, et nous condamne en fait toujours à être tiré vers le bas.

Pascale Fourier : Condamnation très réelle ? C'est-à-dire que si on laisse le libre-échange perdurer, la France, à terme, devrait renoncer à ce qu'on appelle son modèle social ?

Jacques Sapir: C'est une évidence. Et c'est déjà en train de se passer. Alors ça se fait de diverses manières. Prenez par exemple le cas de l'Allemagne. On s'aperçoit aujourd'hui que les entreprises allemandes n'arrivent à gonfler leurs résultats qu'en transférant leurs activités hors d'Allemagne, dans les nouveaux pays de l'Europe des 25, où, évidemment, les coûts sociaux et écologiques sont beaucoup plus faibles. Le résultat de cela, c'est que les entreprises maintiennent des résultats sont certes tout à fait satisfaisants, mais on a de l'emploi qui se déplace, qui se délocalise, et on a un chantage qui est fait vis-à-vis des salariés qui restent dans les pays relativement protégés. On l'a vu avec les 35H00 : " Ou vous acceptez spontanément d'abandonner les 35H00, c'est-à-dire les bénéfices d'une protection sociale, ou nous fermerons l'usine ". C'est le chantage à l'emploi. Et ce chantage à l'emploi n'existe que parce qu'on est en situation de libre échange.

Pascale Fourier : La charge que vous faites contre le libre échange est forte. Mais qu'est-ce qu'il est possible de faire ?

Jacques Sapir: Alors, il y a grosso modo deux types de solutions. La première - la plus attrayante - consisterait à se mettre d'accord globalement sur des règlementations sociales et écologiques communes et qui soit fondées cette fois-ci sur le mieux-disant, le mieux-offrant. Malheureusement c'est une utopie, et il faut la considérer comme telle. On peut avoir certains pays dont les législations sociales et écologiques convergent, mais nous voyons bien que les situations dans les espaces politiques nationaux sont relativement différentes, y compris en Europe. Ce qui est tout à fait frappant, c'est que dans l'Europe des 25, il y a en réalité une très grande diversité de cultures politiques, et certaines cultures politiques mettent en avant plutôt certains aspects que d'autres. Il est clair par exemple qu'en France la sensibilité écologique est moins poussée qu'en Allemagne ou qu'aux Pays-Bas, mais que par contre la sensibilité sociale y est peut-être plus poussé que dans d'autres pays. Il y a donc des spécificités nationales du point de vue des cultures politiques, et on n'arrive pas en réalité à constituer un accord global. On le voit bien au niveau de l'Union Européenne : il y a beaucoup gens de gauche qui disent que la vraie réponse à tous ces problèmes, c'est l'Europe sociale. Soyons sérieux ! Cette Europe sociale, on en parle depuis plus de 15 ans, et elle n'avance pas. Pourquoi ? Pour une raison très simple. Ou vous respectez la souveraineté des autres pays, et vous êtes obligés d'accepter sur des questions aussi importantes la règle de l'unanimité, et il y aura toujours quelqu'un pour bloquer. Ou vous dites : " La règle de l'unanimité saute ", mais ça peut devenir insupportable pour beaucoup de pays qui ne vont pas accepter de perdre leur souveraineté. Et je dois dire d'ailleurs qu'il est très clair que la population française, les électeurs français, n'accepteraient pas - et d'ailleurs, il ne l'ont pas accepté - des réglementations qui seraient régressives, imposées par une instance internationale. On a là une espèce d'échec fondateur du mythe de l'Europe sociale, tant que ce projet porte sur des pays dont les cultures politiques sont très différentes. Si on discute après de l'Europe sociale entre la France, l'Allemagne, la Belgique, l'Italie, bref grosso modo les pays fondateurs du Traité de Rome, là, je serais nettement moins négatif: je pense que cette Europe sociale peut exister, mais elle ne peut exister que sur un nombre très limité de pays. Donc, de facto on pose le problème de l'autre solution. Si on ne peut pas faire l'Europe sociale, qu'est-ce qu'on fait ?
Eh bien la seule solution, c'est de compenser les coûts supplémentaires que, d'une certaine manière, nos sociétés acceptent de s'infliger par de la protection sociale, par de la protection écologique, par de la réglementation du travail - du temps de travail, la protection du travail des mineurs, la protection du travail de femmes. Il faut donc compenser. Comment compenser ? De plusieurs manières. La plus simple, c'est de compenser par des droits de douanes, qui pourraient être calculés à partir des écarts de productivité. Un pays dont la productivité est très faible ne peut pas en réalité fournir la protection sociale et écologique d'un pays dont la productivité est très forte. Donc ce pays-là ne devrait pas être taxé, ou devrait l'être de manière extrêmement faible. Par contre, quand un pays dont la productivité est très forte - je pense aux Etats-Unis - refuse d'appliquer des réglementations écologiques ou sociales, il doit y avoir des droits de douanes qui compensent le coût de nos propres réglementations. J'insiste sur un fait : c'est que c'est très important pour les emplois à faibles qualifications, car ce sont ces emplois-là qui sont les plus vulnérables aux effets de coûts liés à la protection sociale et à la protection écologique. Or il faut savoir qu'aujourd'hui, pour éviter un effondrement de l'emplois dans les secteurs à basse qualification - qui vont rester importants dans nos économies -, nous sommes obligés de subventionner les emplois. Un exemple : les abattements de charges pour les PME représentent plus de 20 milliards d'euros par an ; la prime à l'emploi, qui est en réalité une subvention aux emplois à faible qualification - il faut bien savoir comment elle fonctionne - représente 4 milliards d'euros par an ; et y a d'autres mécanismes de subventions. Donc nous sommes obligés de subventionner massivement des emplois pour éviter qu'ils se délocalisent ou qu'ils soient détruits par fermeture. Et en contrepartie, nous n'avons plus le budget pour financer les efforts en recherche et développement qui nous permettraient d'avoir toujours la compétitivité technique nécessaire pour le futur. J'ai donné deux exemples : ça fait 24 milliards d'euros par an. Il faut savoir que l'agence d'innovation et de compétitivité - c'est une très bonne chose - qui a été créée en 2005 par le gouvernement de Villepin, ne reçoit qu'un milliard d'Euros par an, c'est-à-dire qu'1/24ème des sommes que l'on dépense pour subventionner des emplois à faibles qualifications, qui en réalité pourraient être sauvés par des protections tarifaires.

Pascale Fourier : Je ne vois pas en quoi la solution que vous préconisez permettrait de lutter contre les importations massives de produits textiles chinois.

Jacques Sapir: De ce point de vue, il faut regarder très clairement où en est dans ce secteur la productivité du travail en Chine - je pense qu'elle est très proche de la nôtre - et quel est le niveau de protection sociale et écologique qui y est appliqué. Et on établit des droits de douane qui visent à compenser l'effet de dumping social et écologique que l'on a dans une industrie qui s'est massivement modernisée. Je dois dire également qu'un autre intérêt du protectionnisme, c'est qu'il permet de choisir les pays que l'on veut favoriser, c'est-à-dire que, si on établit des barrières protectionnistes, on peut décider de les lever spécifiquement pour un pays. Et la question du textile nous donne un exemple très intéressant. Jusqu'à maintenant, c'est-à-dire grosso modo jusqu'en 2006, le textile était relativement contingenté sauf pour des pays comme le Maroc ou la Tunisie, bref pour les pays de l'arc méditerranéen. Et quand on a décontingenté le secteur - c'est à ce moment-là que les exportations chinoises sont arrivées - , ça a eu un effet tout à fait dramatique sur l'emploi au Maroc et en Tunisie, avec des éléments de destabilisations sociales vraiment très graves surtout pour le Maroc - la Tunisie je connais moins, elles sont peut-être aussi graves qu'au Maroc, mais je ne peux pas en parler de manière aussi précise - mais en tous les cas, pour le Maroc, l'économie du nord a été complètement destablisée, avec des problèmes sociaux très graves et une aggravation du basculement de l'économie du nord du Maroc dans l'économie de la drogue, qui est aujourd'hui la véritable sécurité sociale marocaine. Et on voit bien que si l'Union Européenne avait conservé des politiques protectionnistes, par exemple dans le secteur du textile, on aurait pu aider le Maroc, dans le cadre d'une négociation politique : " On vous fait une exemption favorable. En contrepartie, dotez-vous d'un programme de montée progressive en matière sociale et écologique, en matière d'éradication de la culture de la drogue, etc". On peut à nouveau rentrer dans de la négociation politique à partir du moment où on a cet instrument. Le libre-échange, au contraire, dépolitise la question, et empêche évidemment toute négociation. Le résultat, c'est qu'on est confronté désormais à des involutions sociales, à des évolutions négatives, qui sont extrêmement graves, que ce soit chez nous bien entendu, ou que ce soit dans des pays qui nous sont proches et dont les crises sociales finiront toujours par rejaillir sur nous.

Pascale Fourier : Et comment fait-on avec les pays nouveaux entrants de l'Europe qui n'ont pas de systèmes de protection sociale équivalent aux nôtres ? On mettrait des barrières tarifaires au sein de l'Europe, entre pays européens ?!!

Jacques Sapir: On peut soit mettre des barrières tarifaires entre européens, mais ceci signifierait la fin de l'Europe telle qu'on la connaît. Mais il y a une solution qui a été utilisée dans le cadre du Traité de Rome qui s'appelle les "montants compensatoires monétaires" - les MCM -, qu'on appellerait ici les "montants compensatoires sociaux". Au départ, les MCM avait été créés pour corriger des effets de dévaluation très forte - ou de réévaluation d'ailleurs, ils auraient pu très bien fonctionner en sens inverse - entre des pays liés par le Traité de Rome. Et on peut là tout à fait dire à ces pays : " Vous avez des productivités qui s'alignent sur les nôtres, vous avez maintenu des taux de change très faibles, vous n'avez pas de protection sociale, on introduit des montants compensatoires sociaux et monétaires, dont d'ailleurs les revenus pourraient vous être reversés pour vous permettre progressivement de constituer les réglementations sociales et écologiques qui vous mettraient à parité avec le noyau de l'Europe". Et je dois dire que, quand on parle de droits tarifaires, de droits de douane ou de montants compensatoires, il faut bien voir que ces droits ont deux effets. Ils ont d'abord un effet direct qui consiste à faire monter le coût du produit importé. Puis ils ont un effet fiscal : on prélève une somme et cette somme va dans le budget de l'Etat. Alors, autant, en tant qu'économiste, la hausse du coût me semble nécessaire - c'est ce qui doit compenser en terme de compétitivité un avantage indu - autant on peut discuter de la légitimité pour le budget français, allemand, belge, etc., de recevoir un revenu supplémentaire. B. Cassen du Monde diplomatique avait en son temps avancé une idée, il y a de cela quelques année. Il disait : " Il nous faut du protectionnisme. Et il faudrait que les montant prélevés soient reversés aux pays pour leur permettre justement progressivement de faire fonctionner un système social plus avantageux ". Eh bien on pourrait très bien dire à ces pays : " Oui, c'est vrai, nous allons pénaliser une partie de vos exportations par le biais des montants compensatoires sociaux, mais l'argent qui en sera retiré, qui sera prélevé, vous sera reversé, dans le cadre par exemple d'une caisse au développement social, qui doit servir à financer des infrastructures sociales, une mise à niveau de votre système de retraite, etc ". Il y a plusieurs manières d'envisager les choses. C'est une manière de dire à ces pays : " Nous ne voulons pas que vos choix déstabilisent les nôtres. Mais si vous vous engagez - évidemment pas d'une année sur l'autre, il faut être réaliste - mais si vous vous engagez dans un délai de 10 ans, par exemple, à converger socialement et écologiquement avec nous, eh bien on est prêt à vous aider, y compris d'ailleurs en se mettant d'accord sur un échéancier à la fois de convergence sociale et écologique de la part de ces pays, et de notre part, de désarmement progressif de ces droits de douanes ou de ces montants compensatoires. Et on arriverait à des formes effectivement de libre-échange. Car l'idée de ces montants compensatoires sociaux n'exprime pas un rejet systématique du libre-échange. Je pense effectivement qu'il y a des moments où il vaut mieux ne pas avoir de droits de douane, et il y a d'autres moments où il vaut mieux en avoir. Mais au moins que cela se fasse de manière ordonnée et avec des engagements réciproques des pays concernés.

Pascale Fourier sur ALIGRE FM 93.1 en région parisienne, EMISSION DU 24 OCTOBRE 2006

Jacques Sapir

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10/12/2007

Contre le traité de Lisbonne

Tribune de Jean-Pierre Chevènement parue dans Valeurs actuelles, vendredi 23 novembre 2007.
En reprenant la substance de la Constitution rejetée, ce traité nourrit la désaffection populaire à l'égard de l'Europe.

M. Sarkozy prétend avoir couvert par son élection le rejet par 55 % des Français du « projet de Constitution européenne », le 29 mai 2005. Rien n'est moins vrai : M. Sarkozy, pendant sa campagne, avait évoqué un « mini traité », un « traité simplifié » qui pourrait être adopté par la voie parlementaire. Mais le traité de Lisbonne est tout le contraire : il reprend sur 256 pages la « substance » de la Constitution européenne. M. Giscard d'Estaing le reconnaît, même s'il déplore que son enfant ait été saucissonné en articles modificatifs, ce qui le rend le particulièrement illisible, même pour des parlementaires chevronnés. Le subterfuge est manifeste ! La tromperie est énorme ! M. Sarkozy s'assoit sur la volonté populaire. Il pourra certes répondre que les socialistes – ou du moins leur direction – en font autant et même davantage, puisque c'est au mépris de leur propre engagement de procéder à un nouveau référendum qu'ils viennent de dire « oui » au traité de Lisbonne. C'est vraiment le seul succès dont M. Sarkozy puisse se targuer, car le nouveau traité ne respecte aucune des promesses qu'il avait multipliées pendant sa campagne de redresser la construction européenne, en instaurant un gouvernement économique de la zone euro, en luttant contre l'euro cher, en instaurant enfin une préférence communautaire aux frontières de l'Union européenne.

Rien de tout cela n'apparaît dans le nouveau traité : M. Sarkozy n'a obtenu aucune contrepartie à toutes les concessions qu'il a faites à Angela Merkel. Il y a un abîme entre les résultats que prétend avoir obtenus M. Sarkozy, dans son discours de Strasbourg du 2 juillet 2007, et la réalité des textes.

Le traité de Lisbonne mérite toutes les critiques faites à la « Constitution européenne ». Un champ immense de nouvelles compétences (art. 3 à 6) est transféré à l'Union européenne. Le vote à la majorité qualifiée s'appliquera à une quarantaine de nouveaux domaines. Ainsi deux instances européennes majeures, dépourvues de légitimité démocratique, la Commission, détentrice du monopole de l'initiative, et la Cour de Justice, chargée, quant à elle, d'interpréter la Charte des Droits fondamentaux, étendront leurs pouvoirs déjà colossaux, au détriment du Parlement français.

Ce nouveau démantèlement de la souveraineté nationale est d'autant plus grave que la parité des votes au Conseil européen entre la France et l'Allemagne, actée dès 1951 par Konrad Adenauer et Jean Monnet comme la base immuable de la construction européenne est rompue par la prise en compte de la démographie. Chacun sait qu'à cet égard la France ne pèse que les trois quarts de l'Allemagne. Bonjour les minorités de blocage !

La marginalisation de la France est également sensible en politique extérieure. Elle ne pourra plus prendre aucune initiative sans en référer au préalable au Conseil européen (article 17 bis). De même, notre statut de membre permanent du Conseil de Sécurité est fortement encadré par l'obligation qui nous est faite de demander l'audition par celui-ci du « Haut Représentant de l'Union pour la politique extérieure », chaque fois que le Conseil des ministres des affaires étrangères, qu'il préside par ailleurs, aura pris une position en matière internationale (art. 19).

Enfin, la défense européenne devra être « conforme avec les engagements souscrits dans le cadre de l'OTAN par les Etats qui en sont membres », c'est-à-dire la majorité et en tout cas ceux qui comptent (art. 27). Exit donc l'idée d'une défense indépendante ! La vassalisation de l'Europe est ainsi consommée par le traité de Lisbonne.

M. Sarkozy peut bien se targuer d'avoir fait disparaître le mot « Constitution ». Un traité qu'on ne peut modifier qu'à l'unanimité des vingt-sept Etats membres est au moins aussi contraignant. 

Ce n'est pas s'avancer beaucoup que de prédire une nouvelle et profonde crise de la démocratie et une désaffection redoublée à l'égard d'une Europe que nos gouvernants avaient une occasion historique de redresser, en s'appuyant sur la volonté populaire.

Quand les inévitables difficultés économiques à venir et les conséquences de l'alignement de notre politique extérieure, en particulier sur l'affaire du Moyen-orient, apparaîtront, alors le peuple français se rendra compte qu'il a été doublement piégé, sans la forme et dans le fond. Le seul véritable coup de maître qu'aura réussi M. Sarkozy aura été d'entraîner le parti socialiste, derrière MM. Kouchner et Jouyet désormais consacrés comme ses « éclaireurs de pointe ». La décrédibilisation de l'opposition n'est pas une bonne chose pour la démocratie.

Pour éviter une colère populaire aveugle, rien n'est sans doute plus important que de songer dès maintenant à rebâtir un recours républicain.

Vendredi 23 Novembre 2007
Jean-Pierre Chevènement

11:30 Publié dans Amis | Lien permanent | Commentaires (0)

07/11/2007

Non à une Constitution "bis"

Ecrasée par son "surmoi" européiste, Elisabeth Guigou n'envisage pas d'autres solutions pour les socialistes que de voter oui au traité de Lisbonne (Le Monde du 1er novembre) et de faire ainsi la courte échelle à M. Sarkozy pour imposer par la voie parlementaire une Constitution bis.



Elisabeth Guigou n'oublie qu'une chose : le 29 mai 2005, le peuple français a rejeté à 55 % des voix un projet de Constitution dont le traité de Lisbonne reprend toute la substance. M. Sarkozy a certes annoncé pendant la campagne présidentielle qu'il ferait ratifier par la voie parlementaire un "mini-traité" ou un "traité simplifié". Mais ce n'est absolument pas de cela qu'il s'agit !

Avec 256 pages empilant les articles qui modifient les traités existants, le traité de Lisbonne n'est nullement un "mini-traité", encore moins un "traité simplifié". C'est d'abord une mystification. On comprend la frustration de M. Giscard d'Estaing, qui, certes, retrouve intégralement son oeuvre dans le traité de Lisbonne, mais brisée en mille morceaux que seuls des juristes besogneux pourront laborieusement recoller. Ce n'est pas ainsi qu'on comblera le déficit démocratique de l'Europe !

Sur le fond, le traité de Lisbonne est surtout un "maxi-traité" qui ne mérite aucune des circonstances atténuantes que lui trouve Elisabeth Guigou. Celle-ci a-t-elle lu l'article 17 bis : "Avant d'entreprendre toute action sur la scène internationale... chaque Etat membre consulte les autres au sein du Conseil européen ou du Conseil" ? Et l'article 19 : "Lorsque l'Union a défini une position sur un thème à l'ordre du jour du Conseil de sécurité des Nations unies, les Etats-membres qui y siègent (la France et la Grande-Bretagne) demandent que le Haut Représentant de l'Union pour la politique extérieure soit invité à présenter la position de l'Union" ?

Chacun peut comprendre que si de telles dispositions avaient été en vigueur en 2003, la France, ne pouvant s'opposer à la fois aux Etats-Unis et à l'Union européenne, dont la majorité des Etats membres sont alignés sur eux, n'aurait pu se dissocier de l'invasion de l'Irak, pas plus que demain elle ne pourra éviter de cautionner des frappes militaires sur l'Iran, si les Etats-Unis, déjà engagés dans la campagne présidentielle de 2008, venaient à les décider !

L'article 27 réitère que l'OTAN reste pour les Etats qui en sont membres (la quasi-totalité) le cadre de leur défense. Exit la défense européenne ! Cela est tout à fait conforme à la politique d'alignement de M. Sarkozy, mais Elizabeth Guigou, qui se déclare "internationaliste" et prétend lutter pour une Europe capable de "peser" en faveur de la paix et de "tirer la rive Sud de la Méditerranée", peut-elle approuver ce texte que seule l'unanimité des Vingt-Sept permettra de modifier ?

Elisabeth Guigou prétend "maîtriser les effets pervers de la mondialisation". Peut-elle ignorer que le protocole no 6 réintroduit par la fenêtre le principe de la "concurrence libre et non faussée" que M. Sarkozy se vante d'avoir fait supprimer de la liste des objectifs de l'Union ? Les statuts de la Banque centrale européenne demeurent inchangés : avec un euro à 1,50 voire 1,60 dollar, Don Trichet continuera à batailler contre les moulins de l'inflation ! Pendant ce temps-là, aux termes du protocole n° 3, l'Eurogroupe "se réunira de manière informelle". Bonjour les dégâts !

Les socialistes pourront-ils assumer les délocalisations qui se poursuivent et le saccage de notre tissu industriel ? Pensent-ils qu'après avoir approuvé le traité de Lisbonne, ils pourront se défausser sur le gouvernement de choix qui résulteront des "contraintes européennes" qu'ils auront eux-mêmes acceptées ?

La vérité est que le Parti socialiste, s'il pouvait compter sur ses dirigeants, aurait un boulevard devant lui : ce qui avait été rejeté par référendum ne peut être adopté que par la même voie. Tel était l'engagement du "projet socialiste" adopté à l'unanimité en 2006, et celui de la candidate socialiste en 2007.

En refusant au moins de prendre part au vote, à défaut de dire non (compte tenu de ses antécédents), le Parti socialiste resterait fidèle à ses engagements. Il éviterait de cautionner l'immense reculade dont M. Sarkozy se targue comme d'un succès diplomatique. Il pourrait alors s'appuyer sur la volonté démocratiquement exprimée du peuple français pour exiger demain une réorientation économique, sociale et politique de la construction européenne. Le Parti socialiste ne pourrait sans doute pas empêcher M. Sarkozy de faire voter son "maxi-traité complexifié". Au moins ne servirait-il pas de marchepied !

Le PS s'isolerait-il à l'égard de la gauche européenne ? Il suffit de voir les difficultés des gauches allemande et italienne pour comprendre qu'un rôle historique incomberait au Parti socialiste français : celui de tracer le chemin pour sortir l'Europe de l'ornière où elle s'enfonce, inféodée qu'elle est aux orientations monétaires ou diplomatiques des Etats-Unis. Dire non à la Constitution bis serait le choix de l'intelligence historique, celui du courage et de l'inventivité. Il n'est en tout cas pas trop tard pour sauver l'honneur, car c'est sur cette base-là seulement qu'on pourra demain reconstruire !

Jean-Pierre Chevènement

22:31 Publié dans Amis | Lien permanent | Commentaires (0)

Haute trahison

par Anne-Marie Le Pourhiet, professeur de droit public, auteur de Droit constitutionnel (Economica, 2007).

Le projet de « traité modificatif » (reform treaty) européen a été rendu public le vendredi 5 octobre. On comprend à sa lecture pourquoi ses rédacteurs ont renoncé aux expressions de « mini-traité » ou de « traité simplifié » puisqu'il ne comporte, avec ses douze protocoles et ses 25 déclarations diverses, pas moins de 256 pages et qu'en matière de complexité rédactionnelle on peut difficilement faire pire.

Dans la mesure où ce texte se borne en réalité à recopier sous une autre forme les trois quarts des dispositions du traité établissant une constitution pour l'Europe, il eût certainement été plus simple de reprendre le texte initial en en rayant seulement les dispositions symboliques abandonnées. On comprend cependant que cette formule ait été écartée car elle aurait manifesté de façon trop criante que l'on se moquait ouvertement de la volonté des peuples français et néerlandais.

Les rédacteurs ont donc préféré concocter une formule compliquée qui modifie d'une part le traité sur l'Union européenne (traité UE) et d'autre part le traité instituant la communauté européenne (traité CE), lequel s'intitulera désormais « traité sur le fonctionnement de l'Union ». La supercherie apparaît clairement avec la Charte des droits fondamentaux qui n'est plus incluse dans les traités mais apparaît dans l'article 6 du texte de la façon suivante : « L'Union reconnaît les droits, les libertés et les principes énoncés dans la Charte des droits fondamentaux du 7 décembre 2000, laquelle a la même valeur juridique que les traités » … Un traité affirme donc qu'une charte qui lui reste extérieure a cependant la même valeur juridique que les traités qu'il modifie ! On n'a jamais vu de procédé juridique plus tordu, même dans les récentes révisions de la Constitution française qui ont pourtant révélé au plus haut niveau normatif l'invasion de notre pays par le « maldroit ». Le protocole n°7 prévoyant cependant que la Charte ne permet ni à la Cour de justice européenne ni aux juridictions britanniques et polonaises d'écarter l'application d'actes nationaux de ces deux pays jugés incompatibles avec ladite charte, provoque un pincement de cœur. Tout se passe comme si le « non » des Français avait servi à d'autres mais pas à eux, quelle humiliation !

Le « traité modificatif » modifie bien le traité constitutionnel rejeté en 2005 puisqu'il en enlève un certain nombre de dispositions explicites et dispense la Pologne et le Royaume-Uni du respect de certains engagements. C'est donc une modification par simple soustraction en ce sens que l'on s'apprête à faire ratifier par le parlement français un traité partiel aux lieu et place du traité complet initial.

Une question fondamentale se pose dès lors : comment le président de la République peut-il décider seul, alors que le peuple français a juridiquement rejeté l'intégralité du traité, de faire cependant ratifier par voie parlementaire la majeure partie des dispositions qu'il contenait au motif que celles-ci « n'auraient pas fait l'objet de contestations » ? Chacun a pu constater, durant la campagne référendaire, que toutes les dispositions étaient critiquées : les uns se focalisaient davantage sur la charte des droits fondamentaux et les politiques communautaires, les autres sur les transferts de compétence, le passage de l'unanimité à la majorité et le déficit démocratique, d'autres encore s'offusquaient des principes et symboles fédéraux. On pouvait peut-être apercevoir que le « non » de gauche déplorait davantage la menace sur l'Etat-providence et le « non » de droite la perte de l'Etat régalien, mais il est certainement impossible et inconcevable de sonder le cerveau de chaque Français en prétendant y déceler des dispositions qu'il aurait rejetées et d'autres qu'il aurait approuvées. La démarche du président de la République prétendant interpréter seul la volonté du peuple français est totalement arbitraire et confine à la dictature. Lorsque l'on sait que la Constitution californienne prévoit qu'une norme adoptée par référendum ne peut être par la suite abrogée ou modifiée que par une autre décision populaire et que la Cour constitutionnelle italienne adopte le même principe, on ne peut qu'être bouleversé par le coup d'Etat ainsi perpétré en France. Si le président a la conviction que les dispositions restant dans le traité modificatif ont fait l'objet d'une approbation implicite des Français, encore faut-il qu'il s'en assure en organisant un nouveau référendum tendant à obtenir leur accord explicite.

Comment qualifier et sanctionner, dès lors, un tel coup d'Etat ? Le texte de la très populaire Constitution de 1793 n'y allait pas de main morte en disposant, dans son article 27 : « Que tout individu qui usurperait la souveraineté soit à l'instant mis à mort par les hommes libres ». La peine de mort étant désormais prohibée par la Constitution française il convient de s'y conformer et de se tourner plutôt vers l'article 35 du texte de 1793 qui affirmait solennellement : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs ». La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, intégrée au préambule de l'actuelle Constitution, range aussi la résistance à l'oppression parmi les droits naturels et imprescriptibles de l'homme.

Notre texte constitutionnel affirme encore que le principe de la République est « gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple » et que son président est élu au suffrage universel direct pour veiller au respect de la Constitution, assurer le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et la continuité de l'Etat et garantir l'indépendance nationale. Le terme qui vient à l'esprit pour désigner le mépris présidentiel de la volonté populaire est évidemment celui de haute trahison. Malheureusement, une révision des dispositions sur la responsabilité pénale du chef de l'Etat, intervenue en février 2007, a substitué à l'antique et belle formule de haute trahison, l'expression affadie et banale de « manquement à ses devoirs manifestement incompatibles avec l'exercice de son mandat ». Cela manque singulièrement d'allure et de force mais l'on s'en contentera cependant en proposant aux parlementaires, au lieu de commettre eux-mêmes une forfaiture en autorisant la ratification d'un traité rejeté par leurs mandants, de se constituer en Haute Cour pour sanctionner le coupable.

Sans insurrection ni destitution, nous n'aurons alors plus qu'à pleurer sur notre servitude volontaire en réalisant que nos élus représentent bien ce que nous sommes nous-mêmes devenus : des godillots.


Mardi 09 Octobre 2007 - 11:56
Anne-Marie Le Pourhiet

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03/11/2007

Constitution bis

Le Figaro
De Villiers: "ce traité est inacceptable car c’est une Constitution bis"
Propos recueillis par Sophie Huet .
 Publié le 23 octobre 2007
                         
Philippe De Villiers, le président du Mouvement pour la France réclame un nouveau référendum.
 
LE FIGARO.–Ce minitraité européen, moins ambitieux, semble-t-il, que la Constitution de Giscard, n’est-il pas acceptable pour les partisans du non?
 
Philippe DE VILLIERS.–Ce traité est inacceptable parce que c’est en réalité une Constitution bis. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est Angela Merkel quand elle a cet aveu: «Toute la substance de la Constitution est maintenue.»
 
Pourquoi parlez-vous de Constitution bis?
 
On retrouve dans ce texte les quatre éléments constitutifs d’un État européen : la personnalité juridique donnée à l’Union européenne, c’est-à-dire la pleine capacité de signer des traités. La supériorité juridique des lois européennes sur les Constitutions nationales. Un service diplomatique supranational, ce qui veut dire une diplomatie autonome de la Commission. Et enfin, un système de décision indépendant des États, avec le record absolu des transferts de souveraineté contenus dans ce prétendu minitraité (quarante compétences nouvelles).
 
François Fillon a rappelé hier à l’Assemblée que Nicolas Sarkozy avait prévenu les Français d’une ratification par le Parlement pendant la campagne présidentielle. Il ne les a donc pas pris en traître…
 
Les Français ne pouvaient pas imaginer que derrière l’emballage du traité simplifié, il y avait la Constitution remaquillée, celle même qui a été massivement rejetée par le peuple français le 29 mai 2005. Seul le peuple français est donc habilité à se prononcer sur le nouveau traité. Nos dirigeants veulent kidnapper le débat en le soustrayant au verdict populaire. Un Parlement, c’est tellement plus docile, surtout quand c’est le Parlement du oui!
 
Que pensez-vous des déclarations de Jean-Pierre Jouyet, qui suggère de supprimer les référendums avant tout nouvel élargissement de l’UE, contrairement à un engagement constitutionnel pris par Jacques Chirac?
 
Elles m’inquiètent parce qu’elles n’ont pas été formellement démenties par l’Élysée. Pendant sa campagne, Nicolas Sarkozy a été parfaitement clair au sujet de l’entrée de la Turquie dans l’Europe: «Je brandirai le veto de la France.» Or depuis cet été, il n’y a pas eu de veto. La France a accepté l’ouverture de nouveaux chapitres dans le cadre de la négociation avec Ankara. Bernard Kouchner est allé dire aux Turcs qu’ils étaient «attendus» dans l’UE. Et enfin, on nous explique qu’il n’y a plus besoin de référendum pour l’entrée de nouveaux pays. Ce serait un coup de force constitutionnel, après la promesse formelle de l’ancien président de la République, reprise… avant d’être démentie par son successeur Nicolas Sarkozy.
 
Qu’attendez-vous de la présidence française de l’UE, qui reprend en juin 2008?
 
J’aimerais être dans l’attente et dans l’espoir. Malheureusement, Nicolas Sarkozy est aujourd’hui engagé dans trois malentendus avec les Français : le premier, sur la construction européenne, avec ce «maxitraité» de 256 pages, avec la volte-face sur la Turquie et avec notre impuissance face à l’euro cher, qui ruine les Français. Le deuxième, sur la politique étrangère. Petit à petit, la France s’aligne sur les États-Unis: Irak, Iran, Kosovo, réintégration dans l’Otan. Cet atlantisme proclamé rend la France inutile dans le monde parce qu’elle lui fait perdre sa véritable vocation historique de puissance d’équilibre face aux empires. Le troisième malentendu, c’est sur la protection de la France et de l’Europe: la Commission européenne vient de renoncer aux quotas textiles sur les importations chinoises, la France n’a rien dit, et il n’y a pas un mot dans le nouveau traité sur le rétablissement de la préférence communautaire. En résumé, on découvre que Nicolas Sarkozy, une fois installé à l’Élysée, pratique contre toute attente un européisme, un atlantisme et un mondialisme aux antipodes de sa campagne.
 

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